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Serviette d'apparat - cache-torchon

Inv.
2022.05.001
Textile
Serviette d'apparat
Uberhandtuch
Dimensions :
H. 158 - L. 34 cm
Lin brodé
mahJ,
don de Jean-Jacques Wahl

Pour toute demande de reproduction veuillez contacter la photothèque.

Contexte d'utilisation
Vie quotidienne
Justification de la date
Porte la date
Historique
Cette longue pièce de lin est brodée avec un fil rouge garance, couleur emblématique des broderies populaires alsaciennes, dénommé plus tard « rouge du Rhin ». Elle porte une inscription en hébreu : « Beila Mordekhai » et « en l’année 528 [1768] », certainement le nom d’un jeune couple et sa date de mariage. Elle est probablement alsacienne mais il en existe également dans le sud de l’Allemagne dont les communautés juives partagent au XVIIIe siècle une même culture matérielle.

De facture très naïve, son décor est composé de motifs végétaux et animaliers symétriques. Pour les premiers, des oiseaux, un aigle à deux têtes – évoquant celui des Habsbourg dont dépend encore au XVIIIe siècle une partie importante de la haute Alsace –, ainsi qu'un lion et un cerf affrontés animaux fréquents dans l’art juif ashkénaze, mais dont l’association brisant la symétrie pourrait ici renvoyer à des patronymes (Loeb /Lyon et Hirsch /Cerf). On remarque aussi des tulipes et un vase de fleur, le maikrug alsacien, représentant ici l’arbre de vie. S’ils peuvent être investis d’une symbolique juive particulière, ces motifs sont aussi très fréquents dans l’art populaire alsacien.

La fonction de ce type de textile a fait l’objet de plusieurs interprétations. L’objet a souvent été décrit comme une serviette rituelle (sederzwehle en judéo-alsacien) utilisée lors des ablutions du repas rituel de la Pâque (seder de Pessah) mais en l’absence d’inscription ou de motif faisant référence à la fête, rien ne permet de le limiter à ce contexte, des ablutions précédant tous les repas. Seule une petite minorité de ces textiles font explicitement référence par leur inscription et/ou leur décor à la fête de Pâque. Il semble plutôt s’agir de serviettes d’apparat, qui n’étaient pas directement utilisées comme essuie-main – ce qui aurait entraîné leur salissure rapide –, mais suspendues comme caches-torchon à côté de la fontaine en étain ou laiton (guissel) placée dans la pièce de vie (stubbe), pour dissimuler un linge ordinaire. On en retrouve d’ailleurs dans les intérieurs chrétiens jusqu’au début du XXe siècle, sous le nom d’uberhandtuch.

Si les broderies, très délavées, sont devenues roses, le tissu est en revanche en excellent état, ce qui confirme son usage décoratif. On remarquera l’ajout ultérieur, avec un coton rouge vif qui a mieux résisté au temps, d’un marquage en caractères latins « M. G. » indiquant un usage sur une longue période. Le cordon d’attache est aussi plus récent.
Provenance
Cet objet provient de la famille du donateur, d’origine alsacienne.
Description
Longue pièce de lin brodée avec un fil de coton rouge garance, de motifs végétaux et animaliers symétriques.
Langue
Français, hébreu
Inscriptions
Inscription brodée en hébreu :
En haut : « בילה מרדכי » et en bas sur deux lignes : « בשנת / תקכח »
Inscription brodée en caractères latins ׃
« M G »
Traduction
Traduction de l'hébreu : « Beila Mordekhai » et « en l’année 528 [1768] »
Bibliographie
Malou Schneider, « L’essuie-main d’apparat, un usage à travers les siècles » in Broder sans compter. L’art de la broderie en alsace du 16e au 20e siècle, Musées de la ville de Strasbourg, 2004, p. 52-59